Dans son Rapport sur l’absentéisme pour cause de maladie 2023, SD Worx a calculé les coûts directs de l’absentéisme pour le secteur privé sur la base des données salariales de 800 000 travailleurs. Katleen Jacobs, consultante juridique chez SD Worx, a collaboré à ce rapport : « L’année dernière, les coûts directs de l’absentéisme se sont élevés à 1 527,63 euros par collaborateur à temps plein.
Le nombre moyen d’heures non prestées par travailleur à temps plein en raison de l’absentéisme a été multiplié par le salaire horaire moyen, tous secteurs confondus. En multipliant ce montant par le nombre total d’ETP, vous obtenez une évaluation assez précise du coût direct de l’absentéisme pour votre entreprise. »
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« L’année dernière, les coûts directs de l’absentéisme se sont élevés à 1 527,63 euros par collaborateur à temps plein »
- Katleen JacobsLa tendance à la hausse de l’absentéisme se maintient
« Malheureusement, tant l’absentéisme de courte durée que l’absentéisme de moyenne et de longue durée continuent d’augmenter au fil des ans », poursuit Katleen. Un certain nombre d’autres tendances persistent également. Par exemple, les absences de courte durée fréquentes sont un problème que l’on rencontre surtout chez les jeunes collaborateurs. Les travailleurs plus âgés sont plutôt absents pendant de plus longues périodes. « Les secteurs caractérisés par un travail lourd et une flexibilité faible enregistrent un absentéisme beaucoup plus élevé », ajoute Bart Teuwen, expert en absentéisme chez Mensura. « Les ouvriers sont pratiquement deux fois plus souvent absents que les employés. »
Les chiffres du Rapport sur l’absentéisme pour cause de maladie sont basés sur les dernières données salariales de SD Worx : des données anonymisées de plus de 800 000 travailleurs de plus de 23 000 entreprises privées belges. Il s’agit de travailleurs âgés de plus de 18 ans et en service depuis plus de 6 mois, à l’exclusion des étudiants et des travailleurs intérimaires. Le prestataire de services RH a analysé l’absentéisme pour cause de maladie de courte durée (< 1 mois) et de moyenne durée (> 30 jours et < 1 an).
Peu d’entreprises calculent les coûts de l’absentéisme
Une entreprise de 100 collaborateurs fait face à plus de 150 000 euros de coûts directs liés à l’absentéisme. Cela donne à réfléchir !
Katleen : « Dans les secteurs à hauts salaires, ce montant est évidemment plus élevé, puisque ces 1 500 euros représentent une moyenne, tous secteurs confondus. Si vous voulez calculer les coûts exacts pour votre entreprise, vous pouvez utiliser des chiffres plus spécifiques en fonction de votre secteur ou de la taille de votre entreprise. Mais même indépendamment de cette nuance, le montant donne une idée assez réaliste de l’impact de l’absentéisme sur vos coûts ou de ce que vous pourriez économiser si vous faisiez baisser vos chiffres de l’absentéisme. »
Bart : « Pourtant, beaucoup trop peu d’entreprises s’interrogent sur l’absentéisme. Lorsque je demande, lors d’une conférence, qui connaît les chiffres de l’absentéisme dans son entreprise, seules quelques mains se lèvent. Très peu d’entreprises chiffrent le coût. »
Un remplacement jusqu’à 50 % plus cher que les coûts salariaux
Ces coûts directs s’accompagnent également de très nombreux coûts indirects.
Katleen : « C’est exact. Le reste de l’équipe doit faire des heures supplémentaires ou il faut chercher un remplaçant, par exemple sur une base intérimaire. Une autre solution est d’intégrer systématiquement une capacité excédentaire. »
Bart : « Certaines grandes entreprises disposent d’une équipe mobile pour couvrir les absences. Dans les soins de santé, par exemple, on a largement recours à des équipes volantes. »
Est-il également possible de chiffrer ces coûts indirects ?
Bart : « D’après la littérature, il faudrait multiplier les coûts directs de l’absentéisme par 2,5 pour se faire une idée de tous les coûts indirects et non mesurables. En faisant ce calcul, on aboutit vite à des chiffres vertigineux. Les remplacements par des intérimaires ou les heures supplémentaires sont jusqu’à 50 % plus chers que les coûts de personnel normaux.
Par ailleurs, l’absentéisme a de nombreux effets non mesurables, comme une baisse de la qualité, un service défaillant, des frustrations au sein de l’équipe et chez les clients, une image de l’employeur entachée, etc. »
Katleen : « Les coûts non mesurables pèsent particulièrement lourd en cas d’absences de courte durée fréquentes. Vous risquez de vous retrouver dans un cercle vicieux qui conduit à encore plus d’absentéisme, voire à une rotation de personnel. Accordez dès lors aussi suffisamment d’attention aux collaborateurs qui reprennent le travail des absents. »
Les points de référence mettent vos chiffres en perspective
Il est impossible d’exclure totalement l’absentéisme. Comment savoir si les chiffres de mon organisation sont acceptables ?
Katleen : « Les points de référence vous permettent de savoir si vos chiffres de l’absentéisme correspondent à ceux d’autres organisations de votre secteur ou s’ils sont d’un ordre de grandeur similaire. Mais attention, ils ne disent rien à propos de la problématique de l’absentéisme proprement dite. Supposons que vous soyez actif dans les soins de santé et que vous obteniez un score légèrement supérieur à la moyenne de votre secteur. Pouvez-vous dormir sur vos deux oreilles pour autant ? »
Bart : « Les points de référence en matière d’absentéisme mettent vos chiffres en perspective, mais ce sont surtout vos propres données qu’il convient d’approfondir. L’absentéisme concerne-t-il principalement les ouvriers ou les employés ? Certains départements sont-ils plus touchés que d’autres ? Les nouvelles recrues sont-elles plus fréquemment absentes que les collaborateurs expérimentés ? Etc. Fixez ensuite un objectif : quel chiffre de l’absentéisme est réalisable pour notre organisation ? Et comment allons-nous l’atteindre ? »
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« Communiquez les chiffres de l’absentéisme ainsi que le coût. Cela ouvrira les yeux sur l’impact financier. »
- Bart TeuwenInscrivez l’absentéisme à l’ordre du jour de la concertation sociale
Quel message adressez-vous aux organisations confrontées à des coûts de l’absentéisme élevés ?
Katleen : « Ne laissez pas les choses suivre leur cours et brisez le tabou. Entretenez-vous avec les responsables et d’autres ‘‘antennes’’ sur le lieu de travail. Abordez la question dans les départements et les groupes de personnel qui enregistrent un taux d’absentéisme élevé. En effet, ce sont les signaux sur le terrain qui inspireront les mesures à prendre. »
Bart : « Communiquez les chiffres de l’absentéisme ainsi que le coût à votre équipe. Cela ouvrira les yeux sur l’impact financier pour l’organisation. Le but n’est pas de pointer les gens du doigt, mais de les emmener sur la voie de solutions. L’implication que vous allez ainsi créer constitue déjà un rempart contre l’absentéisme. Encore une chose pour terminer : nous entrons dans une nouvelle législature de concertation sociale. Inscrivez la lutte contre l’absentéisme à l’ordre du jour de votre Comité pour la prévention et la protection au travail (CPPT). »